LA PROMESSE D'UN ABATTEMENT POUR DURÉE DE DÉTENTION
Par une décision en date du 29 décembre 2020, les 9ème et 10ème chambres du Conseil d’Etat rendent un arrêt SCI Les Amandiers n°428306 portant sur la détermination de la date d’acquisition en matière de plus-value immobilière. Cet arrêt ne pose pas de changement majeur mais précise les règles en la matière, dans la continuité de la jurisprudence du Conseil d’Etat.
L’affaire en cause concernait une société civile immobilière (SCI) ayant acquis et cédé le 23 novembre 2011, des parcelles de terrains à bâtir. Ces parcelles de terrains avaient fait l’objet préalablement de promesses synallagmatiques de vente les 19 octobre 1998 et 18 mars 1999, au bénéfice de la SCI. L’administration fiscale a remis en cause le calcul de la plus-value immobilière réalisée au titre de cette cession, au motif que la vente était intervenue le 23 novembre 2011 et non pas au moment de la signature des promesses de vente.
La SCI se prévalait de l’abattement pour durée de détention prévue à l’article 150 VC du code général des impôts prévoyant un abattement de la plus-value brute de:
- 6% pour chaque année au delà de la cinquième année de détention;
- 4% au titre de la 22ème année.
Ainsi, elle faisait état d’un abattement de 48% (13 ans de détention: (13-5)x 6 = 48) pour les parcelles ayant fait l’objet de la promesse en 1998 et d’un abattement de 42% (12 ans de détention: (12-5) x 6 = 42), pour les parcelles ayant fait l’objet de la promesse en 1999. En considérant que l’acquisition avait eu lieu le 23 novembre 2011, l’administration fiscale empêchait la mise en oeuvre de l’abattement.
La Cour administrative d’appel de Marseille a estimé dans son arrêt du 21 décembre 2018 que la SCI devait être regardée comme propriétaire des biens immobiliers à la date de la signature de l’acte authentique, soit le 23 novembre 2011. Selon les juges du fond, le fait que les promesses de vente stipulaient que les parcelles appartenaient aux vendeurs et que l’acquéreur ne deviendrait propriétaire qu’à compter de la signature des actes de vente, impliquait que le transfert de propriété n’aurait lieu qu’à cette date.
Le Conseil d’Etat estime que la SCI peut valablement se prévaloir de l’abattement pour durée de détention car elle doit être regardée comme propriétaire des biens en cause à compter de la signature des promesses de vente.
En effet, l’article 1583 du Code civil dispose que la vente « est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ». L’article 1589 ajoute que « la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix ».
Ainsi, dès lors que la promesse de vente est exempte d’une quelconque condition suspensive, condition par laquelle la conclusion d’un contrat est subordonnée, elle doit être considérée comme déclenchant le transfert de propriété. Comme le dit la lettre de l’arrêt, une telle promesse de vente révèlerait le consentement réciproque des deux parties sur la chose et le prix.
En l’espèce, la clause retardant le transfert de propriété ne revêtait pas la nature d’une condition suspensive. La condition suspensive est la condition par laquelle la conclusion d’un contrat est subordonnée. Toutefois, en regardant l’effet d’une telle clause sur le contrat, on observe que même en l’absence de cette clause, la vente aurait pu être conclue. Son seul objet était de moduler les effets de la vente, ce qui n’est pas possible lorsque l’on stipule à contre-courant de la loi.
Une telle clause n’a décemment pas la même teneur qu’une condition suspensive constituée par l’obtention d’un prêt ou d’un permis de construire pour la conclusion d’une vente.
Frédéric Quidal