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Traitement du déficit d'une société de personne en cas de démembrement


Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 08/11/2017, 399764

Dans sa décision du 08 novembre 2017, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur le traitement qu’il convient de réserver au déficit d’une société de personne dont les parts sont démembrées.


En l’espèce, M et Mme B…A… ont été assujettis à une cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu au titre des années 2009-2010. En effet l’administration fiscale est venue pointer du doigt la déduction sur le résultat de leur revenu foncier de la quote-part du déficit de la « SCI Quatre » que les époux détiennent.


Ayant créé une société civile immobilière dénommée « SCI Quatre », M et Mme B…A… disposent chacun de 20 parts sociales en pleine propriété et 20 parts démembrées dont la nue-propriété appartient à leurs enfants. Les époux avaient donc déduit de leur revenu foncier le déficit de leurs parts sociales à concurrence des parts qu’ils détiennent en usufruit. C’est sur ce point que l’administration fiscale les a repris en leur ajoutant une cotisation supplémentaire.


Dans un premier temps, le tribunal administratif de Pau a fait droit à leur demande tendant à la décharge de cette cotisation supplémentaire. (Jugement du 28/01/2014 n°1201490).


Par la suite, le ministre de l’économie et des finances a interjeté appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Bordeaux. Cette dernière a infirmé le jugement initial et a annulé ses articles 1er et 2ème en maintenant la demande de l’administration fiscale (Arrêt du 15/03/2016 n°14BX01701).


Les époux B…A… ont alors formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat. Par son arrêt du 8 novembre 2017, l’instance suprême s’est fondée sur l’article 8 du Code Général des Impôts pour affirmer que dès lors qu’une société de personne n’a pas opté pour le régime fiscal de l’impôt sur les sociétés, si elle est composée de parts sociales démembrées alors l’usufruitier de ces parts est soumis à l’impôt sur le revenu pour les résultats qui lui sont conférés à concurrence des parts qu’il détient en usufruit. Lorsque ce résultat est déficitaire, l’usufruitier est apte à le déduire de ses revenus fonciers.


Par sa décision le Conseil d’Etat institue une nouvelle solution indiquant la position à retenir sur le traitement des déficits éventuels.


Tandis que le nu-propriétaire détient le droit de propriété, l’usufruitier détient le droit de jouissance. Bien que disposant des fruits se rapportant au bien, l’usufruitier doit avant tout en conserver la substance. Il lui incombe de cette façon l’entretien des lieux.


Le déficit litigieux provenant des charges courantes de réparation de l’immeuble, c’est en qualité d’usufruitier et les obligations liées à ce titre que les contribuables ont effectivement déduit cette somme dans la déclaration de leur impôt sur le revenu mais uniquement à concurrence de la quote-part du revenu foncier correspondant aux droits des résultats de leurs parts sociales comme en dispose l’article 8 du CGI « En cas de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l'usufruitier est soumis à l'impôt sur le revenu pour la quote-part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui confère sa qualité d'usufruitier ».



Précédant cette partie de l’article 8 il convient de tenir compte du principe selon lequel « les associés des sociétés de personnes qui n’ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société ».


De cet article et de la jurisprudence constante (CE,18 juin 1980, M. X., n° 15186), le Conseil d’Etat sous-entend dans son interprétation que « bénéfice » se rapproche également de déficit s’il y a lieu ; et prône dans sa solution l’interprétation suivante : « Lorsque le résultat de cette société de personnes est déficitaire, l'usufruitier peut déduire de ses revenus la part du déficit correspondant à ses droits ».


Demeurant dans la limite du texte législatif, c’est à bon droit que les requérants n’ont déduit que le déficit dû en raison de la quote-part des parts sociales qu’ils détiennent et non la totalité des dépenses réalisées. En ce sens aucun abus de droit ne peut leur être reproché.


En opposition avec la solution retenue par les juges de seconde instance, la nouvelle solution émise lors du pourvoi la censure entièrement en ce qu’elle prétendait que « l'usufruitier ne peut pas déduire les déficits engendrés par l'activité de la société, sauf si une convention en sens contraire a été conclue entre l'usufruitier et le nu-propriétaire ».


A cette croyance, le Conseil d’Etat viendra affirmer qu’aucune convention n’est nécessaire dès lors qu’est attachée à la qualité intrinsèque d’usufruitier la possibilité de déduire le déficit de l’usufruit sur la part des revenus fonciers lorsque celui-ci provient de charges attachées à des dépenses d’entretien, de réparation ou d’amélioration considérées comme déductibles.


En employant le même traitement fiscal réservé à une SCI non démembrée à celui d’une SCI démembrée, le juge confirme sans aucune nuance l’imputation sur le revenu foncier de la quote-part du résultat déficitaire incombant aux usufruitiers et rejette pour erreur de droit l’arrêt des juges du fond.


En conclusion il est clairement mentionné par le Conseil d’Etat que le déficit constaté sur des parts de sociétés de personnes est déductible du revenu foncier de l’usufruitier et non du nu-propriétaire.



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